Going Clear : propagande versus information

Rédigé par Eric Roux le 11/11/2015 à 19:43 | 11/11/2015

Fin octobre, je tombe en face de mon Eglise sur Diego Bunuel de Canal Plus accompagné d’Alex Gibney, réalisateur du « documentaire » américain Going Clear, en train de tourner un petit reportage pour le Grand Journal, reportage destiné à être diffusé le soir avant la diffusion de Going Clear sur Canal Plus. Si Alex Gibney n’a pas osé venir me parler, Diego Bunuel est venu, et lorsque je lui ai fait remarquer que d’un point de vue déontologique il aurait été bien de donner la parole à quelqu’un de l’Eglise pour répondre aux accusations de Gibney, il m’a laissé sa carte.
 
Après quelques échanges d’email polis, M. Bunuel a conclu que ce n’était pas de son ressort (je ne sais alors ce qui serait « de son ressort »), et le redac chef du Grand Journal, Laurent Kouchner, a refusé toute invitation sur le plateau ou toute interview pour « des raisons éditoriales ». Plus que dommage.
 
J'ai vu Going Clear. Ce qui est véritablement dangereux dans ce genre de prétendus documentaires, c'est qu'on confond information et propagande, ce qui est une forme sournoise de manipulation du spectateur. Alex Gibney n'est pas un journaliste lorsqu'il fabrique son documentaire, et ne s'astreint à aucune déontologie. Il est de manière évidente devenu un propagandiste anti-scientologue, qui aujourd'hui est entré en campagne contre la religion scientologue.
 
Gibney a prétendu en se répandant dans les médias que l’Eglise de Scientologie aurait refusé de répondre sur le fond. La vérité est tout autre. Gibney a (et c’est lui qui l’a avoué) tourné pendant deux ans son documentaire en cachette. Lorsque l’Eglise l’a appris, elle lui a écrit à 14 reprises officiellement pour proposer de répondre aux allégations qu’il allait faire dans son documentaire. Sans réponse. De nombreuses personnes scientologues se sont proposées pour répondre aux allégations de son film, incluant les dirigeants de l’Eglise de Scientologie Internationale, et des membres des familles des personnes dont on savait (et pour cause, vous le comprendrez après) qu’elles allaient fournir leurs « témoignages ». Elles étaient des témoins de première main. Refus de Gibney d’entrer en contact avec ces personnes. Pourquoi ne voulait-il pas les entendre ? Il l’a dit lui-même : « Nous avons eu l’histoire que nous voulions ».
 
Les personnes qu'il interviewe pour donner du cœur à son « documentaire » sont toutes des militants anti-scientologues professionnels, qui en outre en ont fait leur gagne-pain après avoir été renvoyées de l'Eglise parfois pour des raisons graves de criminalité avérée. Alors que Gibney prétend dans 20 minutes qu’il aurait mis deux ans pour « convaincre » « d’anciens membres » de parler à visage découvert dans son film, on s’aperçoit que toutes les personnes qu’il a interviewées sont le même petit groupe qui depuis des années fait le tour des « talk shows » et des tabloïdes pour déblatérer sur leur ancienne religion. Ils ont peaufiné ensemble leur discours pendant des années, et Gibney n’a fait que reprendre les mêmes, qui profèrent les mêmes « horreurs » inventées et créées dans le but avoué de nuire à la scientologie et aux scientologues.
 
Toutes les allégations faites par Gibney et son équipe d’acteurs ont déjà été démontées en détail et de manière très documentée avant qu'il ne fasse son film, mais Gibney, contrairement à ce qu'il prétend, a choisi d'ignorer toutes les preuves qui contredisaient sa propagande. Certains de ses « témoins » ont tenté de faire croire à ces mêmes allégations devant les tribunaux américains et se sont vus condamnés à payer des dizaines de milliers de dollars à L’Eglise pour procédure abusive, après que leurs mensonges aient été percés à jours par la justice. Mais Gibney, qui le savait, a oublié de le préciser quand il leur faisait répéter ces mêmes mensonges devant la caméra.
 
Malheureusement, cela me fait penser à la propagande antimaçonnique telle qu'elle a été faite par Riche et Rivière dans leur film Forces Occultes en 1943. On utilise des procédés "artistiques" pour diaboliser un mouvement, en injectant quelques éléments "vrais" pour tenter d'apporter du crédit au reste des allégations, ce qui permet après de justifier ensuite toutes les attaques à l'encontre du mouvement, qu'il soit philosophique ou religieux. C'est extrêmement dangereux et il est dommage que Canal Plus souscrive à cette propagande, sans même chercher à équilibrer les débats en donnant la parole à l'Eglise.
 
Bien sûr Gibney, après avoir prétendu que l'Eglise ne supportait pas la critique, se plaint partout qu'il est critiqué personnellement par les scientologues. Il devrait regarder la poutre qu'il a dans l’œil avant de voir la paille dans celui de son voisin, et apprendre à se remettre en question. Sa manière de fonctionner est bien résumée par Lawrence Wright, l’auteur du livre éponyme dont est tiré Going Clear : « La vérité est un de ces termes subjectifs par lesquels il est inutile de se sentir lié ». Et Gibney de préciser que pour Going Clear : « J’ai entièrement fait confiance à Larry » (Larry = Lawrence Wright). On comprend mieux.
 
Sur le fond comme sur la forme, la scientologie n'a rien à voir avec ce que décrit Gibney dans son film. C'est une fiction que certains peuvent trouver intéressante, mais il ne faut pas s'y tromper, c'est de la propagande, pas de l'information. La vie des scientologues et de l'Eglise est faite de succès et de bonheur, et la spiritualité profonde qui est la matière même de la scientologie est aux antipodes de la vision malade de Going Clear.
 
Finalement, je plains Alex Gibney, lui qui n’hésite pas à déclarer « les scientologues sont comme des vampires » dans Libération (merci pour moi et les milliers de scientologues français qui heureusement ont le sens de l’humour), qui pleure dans les médias qu’il serait « harcelé » par les scientologues (tout en reconnaissant qu’il n’a jamais eu une quelconque menace contre lui, va comprendre), ne supporte pas que l’Eglise se permette de répondre à sa « vérité absolue et qu’il est interdit de contester », tout en se prétendant un chantre de la liberté d’expression, et pleure parce que ses sources seraient « discréditées » par la scientologie. Quand à la jalousie évidente qu’il exprime lorsqu’il parle de Tom Cruise ou John Travolta, elle est triste et sent le désespoir intérieur.
 
Pendant ce temps, tandis que le chien aboie, l’Eglise de Scientologie et la philosophie religieuse qu’elle incarne et dissémine continue d’intéresser de plus en plus de gens. L'ouverture ces derniers mois de plusieurs églises "idéales" de scientologie à Bâle (http://www.ericroux.com/Inauguration-de-la-nouvelle-eglise-de-scientologie-ideale-a-Bale_a283.html), Bogotá (http://www.ericroux.com/Inauguration-de-la-nouvelle-eglise-de-scientologie-ideale-a-Bogota-Colombie_a286.html), Tokyo (http://www.ericroux.com/Japon-inauguration-d-une-nouvelle-Eglise-de-Scientologie-ideale-a-Tokyo_a289.html) et la semaine dernière à Milan (http://www.ericroux.com/Italie-la-plus-grande-Eglise-Ideale-de-Scientologie-au-monde-inauguree-a-Milan_a293.html) pour répondre à la demande en est une parfaite illustration.
 
A noter que n'en déplaise à Gibney et Canal, la scientologie n'est pas uniquement reconnue comme une religion aux Etats-Unis, mais aussi tout autour de nous, en Espagne, au Royaume Uni, au Portugal, en Italie, en Suède, en Hollande, etc. Mais bon, faut croire que pour Canal et Gibney, tous ces gens-là sont des idiots...
 
Pour une documentation très fournie sur la propagande d’Alex Gibney, incluant documents originaux et vidéos (en anglais), rendez-vous sur http://www.freedommag.org/going-clear/
Eric Roux
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